Thèse
Bilan des nutriments et du carbone dans les zones humides naturelles et artificielles de tête de bassin versant. Cas du bassin versant du lac de Carcans-Hourtin
Soutenue
le 07-10-2024Par
Romane DARULDirecteur(s) de thèse
Pierre Anschutz / Cristina Ribaudo
Membres du jury
Mme ROSEBERY Juliette, DR INRAE, Examinatrice
Mme DUPUY Christine, Professeur, La Rochelle Université, Rapporteur
M. METZGER Edouard, Professeur, Université d'Angers, Rapporteur
M. SEBILO Mathieu, MCF, Sorbonne Université, Rapporteur
M. ANSCHUTZ Pierre, Professeur, Université de Bordeaux, Directeur
Mme RIBAUDO Cristina, MCF, Bordeaux INP-ENSEGID, Directrice
Résumé
Les zones humides sont soumises à de nombreuses menaces telles que l'eutrophisation, la perturbation de leur hydrologie par les activités humaines et le changement climatique. Des travaux de restauration des sites naturels et la création de zones humides artificielles sont réalisés par les gestionnaires territoriaux afin de préserver les services écosystémiques qu'elles abritent : support de la biodiversité, épuration des nutriments et stockage de carbone. Les zones humides de tête de bassin versant sont donc particulièrement importantes car elles influencent la qualité de l'eau en aval et la biodiversité des écosystèmes aquatiques d'une grande partie du bassin hydrographique en aval.
Le bassin versant des lacs médocains est un territoire très anthropisé, dédié à la culture de pins et l'agriculture. Il abrite de nombreux milieux humides naturels, les lacs de Carcans-Hourtin et de Lacanau, des marais, des cours d'eau et de nombreuses mares temporaires forestières, reliquats de la zone marécageuse ayant existé avant l'expansion de la sylviculture sur le plateau Landais. Ces dernières sont soumises aux risques d'eutrophisation et d'assèchement ; leur nombre diminue chaque année. A ces milieux naturels s'ajoutent des fossés creusés entre les parcelles sylvicoles, et des Zones Tampons Humides Artificielles (ZTHA), construites en aval des exploitations agricoles afin d'abattre les flux de nutriments provenant du lessivage des champs. L'étude de ces zones humides naturelles et artificielles est donc un point stratégique de la gestion territoriale.
Dans ce travail de thèse, la physico-chimie de 12 mares temporaires et de 3 ZTHA a été suivie pendant environ 2 ans. Des carottes sédimentaires ont été prélevées dans des ZTHA afin de quantifier les flux de nutriments à l'interface eau-sédiment en lien avec les processus d'abattement des nutriments. Pour les mares temporaires, un bilan du carbone a été établi grâce à des mesures de flux de CO
2 et de CH
4 aux interfaces eau-atmosphère et sédiments exposés à l'air-atmosphère, à l'aide de chambre à flux, et à des mesures de taux d'accumulation du carbone grâce à la datation au
210Pb dans des carottes sédimentaires. L'identification de ceintures de végétation et des récoltes de biomasses ont été réalisées sur 6 mares temporaires.
Les résultats de ce travail de thèse montrent que les ZTHA sont, à l'heure actuelle, trop petites pour abattre efficacement le nitrate provenant de la fertilisation des champs. Cependant, les processus de dénitrification et de séquestration du phosphore dans les sédiments sont bien présents. Les travaux d'agrandissement et la construction de nouvelles zones devraient permettre de réduire efficacement les flux de nutriments à l'avenir. Les mares temporaires étudiées sont acides et majoritairement oligotrophes. Un phénomène de nitrification a cependant été mesuré lors de la remise en eau de mares longuement asséchées pendant l'été et une contamination au nitrate a été identifiée dans plusieurs mares situées en aval des zones agricoles. Les sites en bon état de conservation ou ayant subi les travaux de restauration les plus récents, consistant en un reprofilage des berges et la sauvegarde de la banque de graines des sédiments, ont été identifiés comme des puits de carbone, contrairement aux sites ayant été sur-creusés dans le passé, et présentent une végétation plus dense et diversifiée. Un gradient de stockage du carbone a été identifié dans les mares : les zones centrales, le plus longtemps immergées, ont des taux de carbone plus élevés que les zones externes.
Les techniques de restauration des zones humides naturelles utilisées actuellement et les travaux d'agrandissement prévus pour les ZTHA semblent donc être des méthodes efficaces pour préserver une bonne qualité de l'eau et un maintien des milieux humides sur le bassin versant du lac de Carcans-Hourtin. Il reste tout de même nécessaire de surveiller l'évolution de ces milieux dans le cadre du changement climatique.